Mon ami Bruno
- 14 févr. 2018
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Salut, bande de tarés.
Quand j'étais môme, parmi mes camarades de classe de primaire, y avait un garçon super spécial. Bruno, il s'appelait.
Tout le monde se foutait sévère de sa gueule, alors du coup, c'est moi qui en ai écopé.
Je me suis toujours récolté les petits animaux blessés, les oisillons tombés du nid, tout au long de ma vie, et lui n'a pas fait exception.
Petit animal fragile, rejeté par les siens. Je sais pas pourquoi ils venaient toujours vers moi, les éclopés de la vie. Putain j'ai quand même pas la gueule à mère Thérésa, je fais peur à tout le monde... sauf aux innocents et aux esprits légers.
Pour te faire un topo, et te décrire le bonhomme, disons que je dois avouer que si tu collais ton oreille à sa tête, t'entendais la mer, hein.
Je pense que la lumière passait d'une oreille à l'autre sans encombre, comme toutes les leçons d'école, d'ailleurs.
Alors c'est sûr, il n'était pas des plus malins, il était parfois absent, et on peut dire que ça lui valait les pires foutages de gueule.
Sans mentir, je crois bien que le premier coup de poing dans la gueule que j'ai mis à quelqu'un, ça devait être à cette époque, pour défendre Bruno, à la rentrée des classes.
J'étais pas un saint, hein, mais je pouvais pas blairer le petit Marco qui ne vivait que pour harceler son prochain. Alors j'ai profité de l'occase.
Tu sais, quand (ouais, ça m'arrive) tu fous un coup de pelle dans la gueule à quelqu'un, si tu dis que c'était pour éteindre le feu qui prenait dans ses cheveux, ça change un peu la donne, on te pardonnera plus facilement. L'intention, tu vois, c'est l'intention qui compte.
Je me suis fait plaise, je l'ai bien morflé le Marco, je l'ai tordu et chiffonné, et j'avais mon excuse toute trouvée. J'avais défendu un enfant... particulier.
Ce que je ne savais pas, c'est que ce faisant, je venais de signer un contrat de copinage exclusif avec ledit Bruno. Alors toute l'année scolaire, je me le suis fadé.
Qu'il ait quelques lacunes intellectuelles, pour tout dire, je m'en cognais. Je suis moi-même pas un génie, la fuite des cerveaux à l'étranger, ça me concerne pas trop.
Ce qui me dérangeait un petit peu plus, par contre, vu qu'il était toujours avec moi, c'est que ce corniaud prenait sa bite pour une console de jeu.
Et crois moi, c'est encore moins bien perçu qu'une gameboy quand t'es en cours. Toute la journée, il s'astiquait la nouille.
Je te dis pas comment on était bien vus dans la cour, putain, de vrais parias. C'est bon, j'ai déjà jamais été trop doué avec les filles, mais là c'était grillé d'entrée, tu penses.
Bruno, c'était devenu ma maladie, tu vois.
"Dis, tu veux bien devenir ma petite amie?" (je te rappelle que j'avais 8 ou 9 ans, j'allais pas commencer par un "est-ce que tu baises" que j'aurais bien été en peine d'honorer par la suite. Et mister Cetro ne faisait pas encore partie de la vie de docteur cédric. Allez tais toi, arrête de m'interrompre)
La réponse était claire: "Ah non, t'as Bruno".
Putain, c'était comme si j'avais un herpès ou le sida.
Alors, voilà, moi je marchais devant, et l'autre derrière il faisait du "air sex".
Les instits lui disaient trop rien, en général, ils l'excusaient. Je crois aussi que ces fumiers devaient se dire, tant que c'est Veto qui en écope, ça va.
Parfois, je m'énervais, tu vois, je lui disais, putain, mais ta bite, c'est pas une lampe à huile, t'auras beau la frotter, il en sortira jamais un génie. Tu vas finir par te choper un pénis elbow, à ce rythme Puis tu peux pas te faire d'amis si tu déballes tout le temps ta tricandille, ça existe pas ça !!!
Et lui, il me répondait ben si, t'es mon ami, toi. Putain, qu'est-ce que tu veux répondre à ça??? Je t'en foutrais, des amis, moi...
Je pouvais lui faire les reproches que je voulais, lui il s'en foutait, il souriait, et il continuait à se tirer sur l'élastique.
J'avais fini par en prendre mon parti. Quand on avait cours de cuisine, c'est lui qui battait les oeufs en neige, je te le dis. Il avait le coup de poignet. S'il avait été plus vieux, pour les activités de collage, son stick UHU aurait bien suffi à l'affaire.
Mais quand j'y pense, heureusement qu'on était tout jeunes, et qu'à cet âge là, ce sont des plaisirs secs. Si en plus il avait été en âge d'éjaculer, j'aurais pas tardé à ressembler à un pêcheur resté trop longtemps sous un vol de mouettes.
Figure toi que j'ai recroisé Bruno, y a quelques mois. Je te rassure il se branle plus en public (ben ouais, en privé, j'en sais rien, t'es con quoi quoi?).
Il a trouvé un boulot à sa mesure, imagine toi, un truc qu'était vraiment dans ses cordes, et c'est même lui qui m'a fait rentrer un moment dans l'entreprise.
Il est branleur de dindons.
Ses patrons avaient jamais vu ça, le mec est employé du mois... tous les mois.
Bruno resplendit de bonheur, il est toujours aussi con, mais il a réussi sa vie.
Tu vois, comme quoi, même ce que tout le monde considère comme un gros défaut chez toi, ce qui fait de toi quelqu'un de différent peut s'avérer être la clé de ta réussite et de ton bonheur.
Allez, salut, les dégénérés.
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