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Une vie en peluche

  • 1 févr. 2018
  • 2 min de lecture

Te souviens-tu du jour où l'on nous a présentés, moi vieil ours en peluche tout juste recousu après une existence auprès d'une autre famille, toi enfant si tendre et pleine d'amour à donner?

Tu m'as de suite adopté, et oui, tu m'as aimé, avec la force et la puissance des sentiments innocents, encore purs et non salis par la boue du vécu, la fange de l'expérience.

Tu avais tant à me confier, tant d'émotions à partager.

J'étais alors ton confident, ton principal ami, j'étais le centre de tes pensées.

J'ai recueilli tes larmes dans mon pelage d'acrylique et les ai faites miennes, mon coeur de mousse s'est éveillé sous les assauts de ta douleur et tes chagrins.

Je me suis fait l'écho de tes bonheurs, tes rires enfantins et tes sourires, c'est bien vers moi que tu les dirigeais, et grâce à eux j'ai vécu des instants éternels.

Mes oreilles faites de tissu ont écouté avec amour et attention toutes tes peines, tes joies, tes peurs, toute la vie que tu créais dans ton imaginaire foisonnant et que j'étais le seul à entendre et à prendre au sérieux. Car j'étais ton ami, et plus que ça encore, une partie de ta famille. Oui, j'étais ton parent, ou peut-être plus encore que ton frère, j'étais une partie de toi.

J'étais pour toi si important, omniprésent dans tes pensées et dans ta vie, de jour comme de nuit. J'avais fini par en conclure que, peut-être, coulait en moi une portion d'humanité.

Comme prévu, le temps a fait son oeuvre destructrice. Rien ne l'arrête, il faut toujours qu'il gâche tout.

Ces moments de magie, de tendresse absolue, s'en sont allés avec les années qui ont passé bien plus vite que je ne l'aurais souhaité.

Hier porté au pinacle de tes priorités, au panthéon de tes amours et amitiés, ta croissance et ta maturité m'ont écarté de toi, elles m'ont piétiné, assassiné. Effacé.

J'ai fini par perdre au fil des ans tout attrait et toute importance pour toi, tu ne m'as plus rien confié.

Posé dans un coin de ta chambre, je ne pouvais qu'assister en spectateur étranger à tes chagrins d'amour et tes colères adolescentes, tes joies de vivre et tes fous rires téléphonés que tu ne voulais plus partager. Plus avec moi.

Est arrivé ce jour tant redouté de la séparation définitive. Notre vie commune a trouvé sa fin dans un vide grenier.

Vieil ours usé jusqu'à la trame, autrefois adoré et aujourd'hui martyrisé par l'indifférence et l'oubli, je ne peux plus attirer les regards d'enfant en mal d'aimer.

J'en ai pourtant vu passer quelques uns, intéressés, curieux, emplis de l'espoir d'enfin trouver un peu d'amour à racheter au rabais.

Puis désintéressés, peut-être de constater qu'il leur serait difficile de rivaliser avec ce vécu qu'ils pouvaient lire dans mes yeux de verre poli, d'aimer autant et d'être aimés comme nous nous sommes aimés.

Ma vie d'ours en peluche s'arrêtera là, j'ai trouvé acquéreur en la personne d'un vieux chiffonnier.

Je serai mis en pièces, déchiré et démembré, mais je n'en concevrai pas plus de douleur que celle que tu m'as infligé en m'ignorant et en me laissant de côté.

 
 
 

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